2ème partie : la vie comme dans un rêve

I. Le Père éternel au pouvoir

          Le leader agit comme une sorte de kitsch esthétique, il offre du rêve à quiconque est prêt à le consommer sans se poser de question, déposant son sucre sur les papilles du désir, voilà le gourmand comblé mâchant en silence l’offrande du leader paternaliste, sans que la main du donneur n’ait eu le moindre effort à faire, et il se sent comme béni par cette main supérieure.

          La photo du leader est suspendue dans toutes les écoles du pays, dans les commissariats, les administrations publiques, image d’un cavalier montant un cheval tobiano, toisant la foule depuis sa hauteur, protégeant et guérissant les humbles de son seul regard, ce regard qui les comble en leur offrant leur dose d’espoir quotidien.

Affiche de Raúl Manteola – 1948 – Musée du Bicentenaire, Buenos Aires.

          Dans son auto décapotable, Perón traverse les quartiers déshérités pour distribuer des ballons de football, des « numéros 5 » en cuir sur lesquels on a imprimé son portrait le plus souriant, ce ballon de cuir qu’on rêvait tant de pousser sur son terrain vague, et qu’aucun autre cadeau de Noël ne pourrait dépasser.

          Voici la foule domestiquée, recevant avec des cantiques laudateurs les paroles du leader, les fidèles n’attendent que sa présence, ne veulent rien entendre d’autre que le son de sa voix, n’espèrent rien d’autre qu’entrevoir sa coiffure luisante de brillantine, son visage lisse, dont le grain disparait sous une épaisse crème visant à dissimuler une ancienne maladie de la peau… Il ne lit jamais ses discours, les visages et les cris remplis d’espoir du public de la Place de mai suffisent à lui souffler les mots qu’ils attendent, ces mots, et les gestes qui les accompagnent, sont leur pain quotidien.

          Pendant son premier mandat il gouverne avec prudence, sous le regard sévère de sa compagne qui veille à ce qu’il reste en prise constante avec les enjeux nationaux. C’est elle qui le guide, lui indiquant les bons moments, celui d’ouvrir le magasin pour distribuer la farine du pain quotidien, et le bon peuple apprend ainsi à l’aimer, à la désirer, à voir en elle la grande protectrice des plus humbles.

          Quant à moi, qui peine à démêler l’écheveau historique tellement confus de cette époque, je tente d’en pénétrer l’intérieur à la machette, de reconstituer le mythe en le décrivant, me basant sur mes propres souvenirs d’enfant. Ce petit train de bois que j’avais reçu certain Noël, de la part de la fondation Evita, que je caressais comme un talisman, et avec lequel je voyageais loin, au-delà des mers, des montagnes et des lacs. Mon grand-père m’avait construit une échelle en bois pour que je puisse grimper à un arbre, et de là-haut j’en voyais passer un vrai, de train, avec son panache de fumée couvrant l’horizon, et pour l’enfant de cinq ans que j’étais, c’était comme un prodige, une apparition magique, quand je descendais de l’arbre, je retrouvais mon petit train de bois, ce premier cadeau des rois mages que je n’ai jamais, jamais oublié.

          Perón pendant ce temps est le grand cuisinier d’une réalité illusoire et toxique, et ceux qui tendent la main veulent à tout prix le toucher, recevoir ses mannes divines. Evita, qui apprend vite les ressorts du pouvoir et de la politique, s’ouvre un espace dans le cœur des petites  gens, et dessine peu à peu l’icône qu’elle va devenir. C’est elle qui lance la révolution distributive, les miracles quotidiens accomplis pour les plus modestes, ces cadeaux semblant tomber du ciel, ici une maison, là des machines à coudre, ailleurs des fraiseuses pour les petits entrepreneurs, des barques pour les pêcheurs du Paraná, des matelas, des jouets, des uniformes scolaires, et puis, aussi, l’amélioration de la condition ouvrière, le droit de vote pour les femmes…

 

          «Les femmes voteront pour elle, et les hommes pour moi», disait le général. Et c’est vrai. Pas toutes les femmes, pas tous les hommes, mais au moins les croyants, ceux qui voient en eux les messies du miracle de la foi, tous ceux qui, plus tard, auront la nostalgie de ces jours heureux, quand l’histoire, sans pitié pour les fidèles, aura décidé de changer de cap pour profiter à d’autres.

II. Magie du pouvoir

          Il existe une croyance fortement enracinée dans l’inconscient collectif des Argentins, au sujet d’un supposé pouvoir magique de leurs dirigeants : celle du «président sauveur de corps et des âmes». Un bon exemple nous en est donné par l’histoire édifiante de la famille Godoy. Celle-ci fêtait la naissance du septième enfant de la fratrie, Hyppolite. Or, une légende courait selon laquelle si le septième enfant d’une fratrie n’avait pas pour parrain le président de la République, il pouvait se transformer en loup-garou. Pour éviter cela, le père Godoy commença par baptiser son fils des deux prénoms de Perón, Juan Domingo, puis entreprit de frapper à toutes les portes pour obtenir que le président voulût bien être le parrain du rejeton.

          Après deux semaines de démarches, vint la bonne nouvelle : le petit Godoy avait obtenu l’onction présidentielle. Il est vrai qu’un refus assorti de la vérification d’une prédiction avalisée par l’Eglise elle-même aurait pu constituer une mauvaise presse pour le gouvernement. Voilà donc Hyppolite dûment baptisé sous l’égide de Perón, tout le monde est content, tout est bien qui finit bien, rien de mal n’arrivera, la vie peut reprendre son cours harmonieux : l’onction présidentielle a préservé le fils de la malédiction !

          Je nage pour ma part dans ce mélange étrange de réalité quotidienne et d’irrationalité, je m’arrange comme je peux avec une mémoire partielle – et partiale – car j’ai grandi dans un pays dont l’univers politique est un labyrinthe impénétrable, j’y cherche mon chemin à tâtons, n’entrevoyant à grand peine qu’un tissu d’incohérences, de contradictions, de corruption, avec pour seul guide un tant soit peu efficace le recours à l’univers fictionnel, de ces fausses pistes laissées sur le chemin par un péronisme habile à habiller d’un pardessus de vérité des faits incertains, de vagues intentions et de simples postures.

          Ma compréhension est seulement parcellaire, des échos, des ombres portées d’une vérité qui se dérobe, me voici à la recherche d’une date manquante, d’un élément qui m’aide à interpréter ce labyrinthe où suinte l’histoire d’un pays lové dans son propre crédo, la réalité argentine est un animal agreste, échappant perpétuellement à l’analyse et à l’entendement.

          Les Argentins avancent comme des somnambules dans un monde qui leur reste inconnu, soixante-dix ans après nous écoutons le même concert, le même cri, reflets réprimés d’une histoire tragique. Les événements deviennent filandreux, et pour pouvoir les raconter on doit détourner les outils de la fiction, pour en donner un aspect à peu près lisible.

III. Les gouvernants et la superstition

          L’histoire des coups d’état révèle notre propre décadence, qui commence en 1930 et se répète ensuite en 1943, 1955, 1962, 1966, 1976, un coup d’état tous les dix ans, interruption du processus démocratique qui revient comme une roue dévalant vers l’abîme. Le passé se répète comme une étrange malédiction indienne. Nietzsche faisait observer que les êtres humains ne supportaient pas le trop-plein de vérité, que la vérité, souvent, était mauvaise pour la santé. Notre pays a oublié le passé, il a oublié que le passé ne s’efface jamais, qu’il n’est qu’une partie, une autre dimension, du présent, comme l’affirmait Faulkner – mais il est bien possible que le leader n’ait jamais lu Faulkner, ou qu’il ait oublié cette citation du grand écrivain Nord-Américain.

          C’est un secret de Polichinelle que tous les présidents Argentins cachaient une véritable personnalité superstitieuse, que, dans l’intimité, ils consultaient, au sein même de la Maison Rose, des voyants avant de prendre toute décision importante.

          Hyppolite Jesus Paz, chancelier durant le premier gouvernement de Perón, entre 1949 et 1951, assurait dans ses mémoires que Juan Domingo Perón avait l’habitude de consulter un voyant du nom de « Mister Lock », qui lui avait été chaudement recommandé par le ministre de la santé publique de l’époque, Ramon Carrillo. Evita, qui ne croyait pas à tout cela, fit cesser les visites du voyant de manière abrupte, lui signifiant de se retirer et de ne plus jamais revenir, car, dira-telle, «La seule ici qui prédise le futur du général, c’est moi.»

          Après la mort d’Eva, Perón commença à consulter régulièrement le Frère Lalo (Hilario Fernández, un Espagnol), qui dirigeait l’école scientifique – néo-spiritiste – Basilio.

          De la même façon que dans le réalisme magique, à l’intérieur du réalisme politique, le péronisme, en tant que phénomène social d’ordre mystique, casse l’ordre logique des choses, et dans ce contexte, n’importe quel événement prend une tournure magique.

          «Il passa de maison en maison, traînant après lui deux lingots de métal, et tout le monde fut saisi de terreur à voir les chaudrons, les poêles, les tenailles et les chaufferettes tomber tout seuls de la place où ils étaient, le bois craquer à cause des clous et des vis qui essayaient désespérément de s’en arracher, et même les objets perdus depuis longtemps apparaissaient là où on les avait le plus cherchés, et se traînaient en débandade truculente derrière les fers magiques de Melquiades.»

Cent ans de solitude, Gabriel García Márquez.

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Manuel Silva – 2021

Version française PV

2ª parte: El peronismo, la vida es un sueño

I. Gobierna el Padre eterno

           El líder funciona como un kitsch estético, le regala ilusión a quien lo consume sin preguntar nada, les deja un sabor dulzón en el sitio de los deseos, permanecen felices gozando de lo que reciben, la mano que entrega la sal de la vida lo hace sin ningún esfuerzo personal, el bocado edulcorado del líder paternalista lo mastican en silencio, se sienten ungidos por una mano superior.

          La fotografía del líder cuelga en la paredes de todas las escuelas del país, en las comisarias, en los despachos públicos, es la imagen de un centauro montando en un caballo tobiano, mira desde su cabalgadura a la muchedumbre, su mirada protege y sana a los desposeídos, su mirada les renueva la esperanza de cada día, los deja complacidos.

Cartel de Raúl Manteola – 1948 – Museo del Bicentenario, Buenos Aires.

          Perón recorre los barrios carenciados en su auto descapotado, regala pelotas de futbol, las número 5, de cuero, en los gajos de cuero esta la cara del líder, con su mejor sonrisa, una pelota de cuero picando en un baldío, era un sueño que ningún rey mago podía superar.

          La masa está domesticada, acepta con ruidosos canticos aprobatorios la verbalización del líder, es apostólica, la multitud solo quiere su presencia, escuchar su voz, verlo con su peinado brillante de gomina, la cara restalla por la crema que oculta una vieja enfermedad de la piel, nunca porta un discurso escrito, las caras expectantes de la Plaza de Mayo, las expresiones de los movilizados son suficiente inspiración para decir lo que ellos quieren escuchar, palabras y gestos del líder son el pan para la muchedumbre.

          Yo, cernido por la dificultad de comprender el entramado histórico, entro a punta de machete en algunos tramos espesos de la historia, escribiendo reconstruyo el mito desde el llano, mis recuerdos de aquel tren de madera que recibí en una navidad, era de la fundación Eva Perón. Acariciaba el tren de madera como un talismán, deseaba viajar por mares, montañas, lagos. Mi abuelo me construyó una escalera de madera para trepar a un árbol, desde su fonda podía ver el paso de un tren de verdad, la formación cruzaba por el horizonte echando vapor por su chimenea, era una visión mágica para un niño de cinco años, aquella imagen se parecía mucho a un acto prodigioso, al bajar del árbol, me reunía con mi tren de madera de la fundación Eva Perón, nunca olvide aquel primer regalo de reyes.

          Perón se muestra como el gran cocinero de una realidad ilusoria y tóxica, personifica a un vendedor de fantasía, los que siempre piden, esperan ser tocados por sus manos, recibir las sales de la buenaventura. Su mujer, Evita, aprende rápido, los rescoldos del poder la motorizan, se está ganando un lugar entre los humildes, será una imagen de culto; ella encarga la revolución distributiva, el milagro de obsequiar unas casas, una maquinas de coser, unos tornos mecánicos para los emprendedores, canoas a los pescadores del Rio Paraná, colchones, juguetes, uniformes escolares, mejorar las leyes laborales, legislar el voto femenino.

          “Las mujeres votaran por ella, los hombres por mí” decía el general. Acertado. No todas las mujeres, no todos los hombres, pero sí los creyentes, los que veían en ellos los mesías del milagro de la fe, los quienes luego añoraran “los días felices”, cuando la historia, sin piedad para los fieles, habrá decido cambiar de rumbo para beneficiar a otras almas.

II. Magia del poder

          Existe una creencia bastante arraigada en la mente de unos argentinos, en cuanto al poder mágico de sus dirigentes supremos: la del presidente salvador de cuerpo y alma. Así la familia Godoy celebraba la llegada de su séptimo hijo varón, Hipólito Godoy. El padre del vástago comenzó a gestionar por distintas oficinas públicas como conseguir el padrinazgo de vástago por el presidente de la nación. Porque el padrinazgo presidencial es el único recurso terrenal para evitar que el séptimo hijo varón se transforme en un lobizón, (un hombre lobo). Así el séptimo hijo de la familia Godoy fue anotado con el nombre de Juan Domingo, o sea, como el presidente, como el líder.

           El bautismo con la venia presidencial para evitar la conversión del retoño en una bestia sedienta de sangre. De no cumplirse con lo estipulado por la iglesia y el mandato del gobierno, la mutación en lobizón constituirá una mala prensa para el gobierno del general. Después de dos semanas de gestión, Godoy fue escuchado en las oficinas del episcopado como de la gobernación, le otorgaron una fecha para bautizar a su séptimo hijo. Todos festejan, el pueblo festeja, nada va a cambiar, todo vuelve a estar en armonía. La unción presidencial ha salvado el hijo de la maldición.

          Dentro de esta mezcla de realidad cotidiana y de irracionalidad, soy participe de la experiencia viva, mi memoria es parcial, individual y colectiva, crecí en un país que no me permite comprender su entramado político, intento una primera aproximación, solo me deja ver un entretejido de incoherencia, de contradicciones, de corrupción, al recorrer la andadura política la explicación me llega a través de la ficción, el peronismo en su trayectoria deja pistas falsas, unos montajes destinados a dar viso de verdad a supuestos hechos, a sentimientos de intención, a gestos que se agotaron en ademanes, en amagues.

          Poseo fragmentos de comprensión, son ecos y sombras de una verdad esquiva, busco el dato ausente, la nota que me ayude a interpretar el laberinto por donde se escurre la historia de un país que se ovilla en su propio credo, la realidad Argentina es un animal montuno, siempre esquivo al análisis y la comprensión.

          Los argentinos deambulan como sonámbulos en un mundo que no reconocen como propio, después de 70 años seguimos escuchando el mismo concierto, el mismo griterío, representan el reflejo reprimido de una historia trágica. Los acontecimientos se vuelven evasivos, es necesario usurpar buenas herramientas de la ficción para poder contarlas, el zigzagueo de la política argentina requiere imprimir un efecto preformativo para escribirlo, darle algún viso de entendimiento satisfactorio a lo redactado.

III. Los dirigentes y la superstición

          La historia de los golpes de estado marca nuestra decadencia, comienza en 1930, luego se fueron repitiendo: en el 1943, 1955, 1962, 1966, 1976, un golpe de estado cada diez años, una interrupción del proceso democrático, una suerte de noria infinita rodando hacia un abismo. El pasado es repetitivo como una pasmosa maldición india. Nietzsche observó que los seres humanos no podemos soportar demasiada realidad y que a menudo la verdad es mala para la vida. El país en su andar olvidó el pasado, olvidó que el pasado no pasa nunca, es solo una parte o una dimensión del presente, —lo dijo Faulkner—, es posible que el líder nunca leyó a Faulkner, perdió de vista la observación del gran escritor del sur de los Estados Unidos.

          No es un secreto que los presidentes argentinos ocultaban una marcada personalidad supersticiosa, en la intimidad del poder consultaban a brujos y videntes antes de tomar una decisión importante, famoso augures ingresaban a la Casa Rosada mandados a llamar por el primer magistrado.

          Hipólito Jesús paz, quien fue canciller entre 1949 y 1951 del primer gobierno de Perón, aseguro en sus memorias que Juan Domingo Perón solía recurrir a un vidente llamado Míster Lock, al augur lo “protegía y admiraba” el Ministro de Salud Pública de la época, Ramón Carrillo. Las consultas al vidente se interrumpieron por la intervención directa de Evita, que no creía en brujas ni en videntes y fue terminante con Míster Lock: “retírese, no vuelva más, porque aquí la única que le lee el futuro al general soy yo”.

          Muerta Eva, Perón comenzó a conversar con frecuencia con el Hermano Lalo (Hilario Fernández, un español) que dirigía la neo espiritista Escuela Científica Basilio.

          Como ocurre en el realismo mágico, en el realismo político, el peronismo como un fenómeno social místico, puede romper el orden lógico de las cosas, y en ese contexto, cualquier acontecimiento puede resultar inverosímil, revestido de magia.

          “Fue de casa en casa arrastrando dos lingotes metálicos, y todo el mundo se espanto al ver que los calderos, las pailas, las tenazas y los anafes caían de su sitio, y las maderas crujían por la desesperación de los calvos y los tornillos tratando de desclavarse, y aun los objetos perdidos desde hacía mucho tiempo aparecían por donde más se les había buscado, y se arrastraban en desbandada truculenta detrás de los fierros mágicos de Melquiades”.

                                                             Cien años de soledad, Gabriel García Márquez.

Manuel Silva – 2021

 

1a parte: esperando al mesías

           “Muchos años después, frente al pelotón de fusilamiento, el coronel Aureliano Buendía había de recordar aquella tarde remota en que su padre lo llevo a conocer el hielo”.

           Es el magistral inicio de “Cien años de soledad” de Gabriel García Márquez, el creador del realismo mágico.

I. Encantos

          En Argentina, el realismo mágico llega de la mano de un líder paternalista, mucho antes de la aparición de la novela “Cien años de soledad”. El hombre que deja el cuartel y se trepa al potro de la política, es observador, disciplinado, empapado por los conocimientos sistemáticos de Karl von Clausewitz, al primer golpe de vista sabe lo que le falta y también lo que le sobra, domina con buenas artes la táctica y la estrategia, procura poner de su lado el tiempo y el espacio, como el temporizador de su andadura.

           Es el hombre indicado, dice su compañera, el guiará a los trabajadores hacia un territorio de gloria, será el Moisés guiando un pueblo por el desierto de carencia y dubitaciones. Su compañera, la que conoció aquel día del terremoto de San Juan, entre las piedras de un pueblo destruido por el cataclismo telúrico, entre las ruinas del sismo, está a su lado, radiante, llena de energías, ella lo mira con ojos desafiantes, con una mirada severa, deja ver la seguridad de un felino, lo tiene en su campo visual, próximo a sus garras. Él la contempla con la vehemencia de un místico, se deja invadir por su encanto, esa mujer surgida de entre los escombros de la convulsión telúrica es el epicentro de su atención. Guarda una distancia prudente, la necesaria para no perderlo de vista, actúa como una lámpara, le alumbra el camino de ruinas. El líder se mueve seguro, sabe con certeza donde planta sus botas, ve con claridad rayana las necesidades rizomamando en el campo social, bulle frente a una muchedumbre en situación de caos, sus palabras llanas son suficientes para remover los resabios de la furia telúrica, su voz atemperada los acompaña, por un momento se olvidan de la catástrofe, de los gobiernos conservadores, juntas militares y obispos lúbricos.

Juan Peron y Evita

          Como en el teatro pirandelliano, los personajes salen a buscar un autor, al final lo encuentran, son los apóstoles del peronismo: los dirigentes de los sindicatos, los punteros políticos, los capitanes de empresa, las damas de la caridad, todos dispuestos a ganar un lugar donde nutrirse del poder, todos medran y se benefician, el líder los contempla y a cada uno les pone un precio.

          Siempre atento al murmullo enfermizo que transmite la muchedumbre, sabe en qué momento dar un golpe de timón, cambia el rumbo de su diatriba, modera los vientos aventando de popa, con la misma parsimonia les habla a los empresarios, a los mandos militares, a los purpurados, a los campesinos empantanados en la miseria, tiene el tono medido para cada uno, elige el momento oportuno para satisfacer sus deseos inmediatos.

II. Luz de los humildes

          La clase trabajadora en los inicios del peronismo hervía de inquietudes, los sindicatos consolidaban su poder, buscaban unas figuras fuertes en donde apuntalarse, al mesías capaz de fundar un mejor porvenir, un catalizador de las necesidades de los más humildes. En 1945 acontece su aparición, como un cátaro trae una nueva realidad, emite una oratoria campechana, les habla de igual a igual, ya elaboró la salsa que cocinará el esperado bocado de la satisfacción.

          El interior del país se moviliza a la Capital Federal, los trenes llegan abarrotados de familias, no traen valijas, carecen de equipaje, bajan del tren con lo puesto, solo quieren estar cerca de la magia, recibir en algún momento la bendición del líder. La gran capital comienza a mutar de color, otras voces resuenan en las calles siempre iluminadas de Buenos Aires, son los “cabecitas negras” o “los grasas del interior” transitan bulliciosos por las calles porteñas, un nuevo color de piel se cuaja en la multitud.

           El peronismo descubre en el andar que el pasado no pasa nunca, el pasado domina al presente y se prolonga hacia el futuro. El discurso no logra atemperar la franca desconfianza en los estamentos altos de la sociedad porteña, en especial, en la iglesia, el personal de las Fuerzas Armadas, se inquietan, la reacción inmediata es xenófoba, racista, no soportan ver a aquellos individuos necesitados de trabajo llenando las calles de la gran ciudad de Buenos Aires, son los huérfanos históricos, son señalados de manera peyorativa, los llaman “cabecitas negras”, descamisados”, el líder y su esposa lo saben, la nueva oleada de “los cabezas” son el respaldo de su gobierno.

          La mirada de indio del líder, esa mirada que no trasunta ninguna imagen, ningún sentimiento por dentro, su voz cautiva, emite las palabras absolutas, grandilocuentes, las que espera escuchar la multitud, sabe como otorgarle otro sentido a una misma acción, se muestra como la polea de transmisión de una maquina de complacer, de darle forma a los deseos de los más necesitados, está allí para salvar, para otorgarles valor a los que no tienen valor.

          Si su energía física y su oratoria puntual ganan espacio entre las masas trabajadoras, también se gana el mal humor en la clase media alta, el descontento de los mandos militares, los obispos en sus homilías arrojan dardos ponzoñosos a la gestión gubernamental.

          La realidad de la política argentina presenta una lógica demencial, escurridiza, se exhibe imposible de narrar, para los propios y los extraños. El argentino de a pie está condenado a saber esperar, como decía Charles Ives, «saber esperar lo que viene, nítido, invisible, como la silueta de una mariposa contra la tela vacía».

          En la atmosfera política flota siempre una promesa, un conjuro, la magia del líder que sabe construir expectativas, soluciones a un futuro que nunca cobra forma. Allí están las necesidades de sus gobernados, con la mejor sonrisa, con la palabra dulcificada les explica a los que esperan: el pasado no pasa nunca, vuelve como una rueda dentada, muerde el presente, lo destruye, lo barniza, luego lo ofrece como el portento de todas las soluciones.

          El sillón de Rivadavia funciona como un trampolín, desde allí se lanzará a dominar los estamentos de la sociedad, será el gran director de orquesta, tocará todos los instrumentos, entonará canticos gregorianos de un nuevo tiempo, todos bailaran al ritmo de su música, la música doma a las fieras, crea emociones, estoy seguro que también calma a los hambrientos, a los más humildes, los desheredados, ellos rezarán por el líder, pedirán por su salud, por el estado de gracia de su compañera, cada noche, antes de acostarse mirarán el retrato colgado en la pared con su traje militar.

                                                                                   Manuel Silva – 2021

(Continuará en parte 2)

1ère partie : l’attente du messie

« Bien des années plus tard, face au peloton d’exécution, le colonel Aureliano Buendía devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l’emmena faire connaissance avec la glace »

          Tel est le début magistral de « Cent ans de solitude », de Gabriel García Márquez, un des écrivains phares du réalisme magique.

I. Enchantements

          En Argentine, le réalisme magique arrive par l’entremise d’un leader paternaliste, bien avant la publication du roman « Cent ans de solitude ». Celui qui abandonne la caserne pour enfourcher le destrier de la politique est un homme observateur, discipliné, pénétré des enseignements de Karl Von Clausewitz ; d’emblée il sait évaluer ses qualités et ses failles, il maitrise à la perfection l’art de la tactique et de la stratégie, sait utiliser à son profit le temps et l’espace à son propre rythme.

          Sa compagne dira de lui : « Il est l’homme parfait, il saura guider les travailleurs sur un chemin glorieux, il sera le Moïse guidant son peuple à travers le désert de la disette et du doute ». Cette compagne, c’est celle qu’il a rencontrée ce fameux jour du tremblement de terre de San Juan, parmi les décombres d’une ville ravagée par le cataclysme, parmi les ruines occasionnées par le séisme. Elle est à ses côtés ; radieuse, énergique, elle lui jette un regard de défi, sévère, laissant poindre l’assurance d’un félin, elle ne le perd jamais de vue, le gardant toujours à proximité de ses griffes. Lui la contemple avec la passion d’un mystique, envouté par ses charmes, cette femme surgissant des ruines telluriques devient l’épicentre de son attention. Elle garde une distance prudente, juste assez pour le garder dans son champ de vision, elle est comme une lumière lui éclairant le chemin entre les décombres. Le leader est sûr de lui, il sait avec exactitude où poser ses bottes, il a une conscience nette des nécessités du peuple, il bouillonne d’idées face à la foule prise dans le chaos, ses mots simples suffisent à effacer les stigmates de la catastrophe, sa voix chaude rassure les gens et pour un instant ils oublient tous leurs tracas, le drame, les gouvernements conservateurs, les juntes militaires et les évêques lubriques.

Juan Peron et Evita

          A l’instar du théâtre pirandellien, des personnages sortent en quête d’auteur, qu’ils finissent par rencontrer, et voilà les nouveaux apôtres du péronisme : dirigeants de syndicats, politiques aux dents longues, capitaines d’industrie, dames patronnesses, tous sont prêts à s’asseoir à la table où ils se nourriront du pouvoir, tous accourent à la gamelle, et le leader les regarde, attribuant un juste prix à chacun d’entre eux.

          Attentif au bruissement contagieux de la foule, il sait précisément quand donner un coup de barre, changer le cours de sa diatribe, gérer calmement les vents arrières, avec le même calme il parle aux patrons aussi bien qu’aux empourprés et aux paysans englués dans la misère, il adopte le ton juste avec chacun, sachant choisir le bon moment pour satisfaire leurs désirs immédiats.

II. Lumière des humbles

          Au commencement du péronisme la classe ouvrière est en ébullition. Les syndicats consolident leur pouvoir, cherchant des figures majeures sur lesquelles s’appuyer, un messie capable de dessiner un avenir meilleur, catalyseur des besoins des plus pauvres. Il apparait en 1945, portant avec lui, comme un cathare, une réalité nouvelle, un discours populiste, il parle d’égal à égal, élaborant déjà la sauce qui liera le tant espéré plat des espoirs comblées.

          Et voilà que le pays tout entier se met en marche, des trains bondés partent pour la capitale, des voyageurs sans bagage descendent sur les quais sans autre richesse que les vêtements qu’ils portent, car ils ne viennent que dans un seul but, approcher le mage et recevoir sa bénédiction. La ville prend de nouvelles couleurs, partout résonnent des voix nouvelles, voici les « cabecitas negras » les « grasas del interior » qui chahutent les rues, voici qu’une nouvelle couleur de peau vient déteindre sur la population.

          Le péronisme se rend compte en passant que le passé ne meurt jamais, le passé domine le présent et se prolonge dans le futur. La teneur du discours ne rassure pas les hautes classes de la société, en particulier l’Eglise et les militaires que ce message préoccupe. La réaction, xénophobe, raciste, est immédiate, la vision de tous ces nécessiteux, ces orphelins de l’histoire, envahissant les rues de la grande ville, acclamant le leader et sa femme, leur est insupportable, ils les affublent de surnoms péjoratifs, «têtes noires», «sans chemise»…

          Le regard d’indien du leader, ce regard qui ne cache aucune image, aucun sentiment intérieur, est parfaitement transparent. Sa voix envoutante émet des paroles absolues, grandiloquentes, ce sont ces mots que la foule veut entendre, il sait comment donner un sens différent à des actions pourtant semblables, il est comme la courroie de transmission d’une machine à complaire, à donner corps aux espoirs des plus humbles, il est venu les sauver, donner de la valeur à tous ceux qui jusqu’ici n’en avaient aucune.

          Mais si son énergie et son discours ont le pouvoir de soulever les masses laborieuses, il provoque en même temps l’agacement des classes moyennes supérieures, le mécontentement des états-majors militaires, et dans leurs sermons les évêques fustigent la gestion gouvernementale.

          La réalité politique argentine prend un tour démentiel, insaisissable, elle devient incompréhensible, pour les locaux autant que pour les étrangers. L’Argentin moyen est condamné à l’attente, comme le disait Charles Ives «savoir attendre ce qui s’annonce, net, invisible, comme la silhouette d’un papillon contre la toile vide».

          Dans l’atmosphère politique flotte en permanence une promesse, une incantation, la magie du leader qui sait créer l’expectative, trouver des solutions pour un avenir qui ne prend jamais corps. Il exprime les besoins de ses concitoyens, le fait avec son meilleur sourire, ses mots sucrés disent à ceux qui espèrent que jamais le passé ne meurt, il tourne à la manière d’une roue dentée, mordant le présent, le détruisant, l’enduisant de vernis, pour l’offrir ensuite comme la clé de tous les problèmes.

          Le fauteuil de Rivadavia est le tremplin d’où il s’élance pour partir à la conquête de toutes les couches sociales, il sera le grand chef d’orchestre, jouera de tous les instruments à la fois, il entonnera les chants grégoriens des temps nouveaux, tous danseront au rythme de sa musique, cette musique qui dompte les bêtes sauvages, crée des émotions, je suis sûr qu’elle apaise aussi les affamés, les plus humbles, les déshérités, qui prieront pour leur leader, pour sa santé, pour l’état de grâce de sa compagne, et qui chaque soir avant de se coucher auront un regard vers le portrait accroché au mur où il pose dans son plus beau costume militaire.

(A suivre)

***

Petit glossaire (éventuellement) utile :

Tremblement de terre de San Juan : le 15 janvier 1944, a eu lieu dans la province de San Juan (500 km à l’ouest de Buenos Aires) le séisme le plus destructeur de l’histoire argentine. Juan Perón, alors ministre du gouvernement militaire de Pedro Ramírez, s’y était rendu dans le cadre de ses fonctions. C’est là qu’il a rencontré sa future épouse Eva Duarte.

Cabecitas negras, grasas del interior : littéralement, “Têtes noires”, “Graisseux de l’intérieur », surnoms péjoratifs donnés (encore aujourd’hui, hélas) aux Argentins d’origine indienne, émigrant de leurs provinces du nord et de l’ouest vers la capitale.

Le fauteuil de Rivadavia : Bernadino Rivadavia (1780-1845) fut le premier chef d’état officiel de l’Argentine indépendante, alors encore nommée «Provinces unies du Rio de La Plata».

Adaptation française PV.

 

Encargados de edificios en Buenos Aires

1. Encargados de acá y de allá

          Hablamos hoy de una profesión que casi desapareció del paisaje de las capitales europeas: la de los porteros. O, mejor dicho, de los encargados de edificios.

          Los más ancianos dentro de nosotros quizás recordarán que hasta los años 70, cada edificio parisino contaba con su “loge”, un departamento minúsculo donde vivía, con toda su familia, la “concierge”, la portera. Digo “la”, ya que en la mayoría de los casos, en Paris el oficio lo ocupaba una mujer. ¿En qué consistía ese oficio? Muchas cosas distintas. Ella recogía el correo, y luego lo repartía entre los moradores. Del mismo modo, ellos podían depositar sus sobres en la portería. Tenía la responsabilidad del buen estado de las partes colectivas del edificio – entrada, escaleras, rellanos, ascensores… – percibía para los propietarios los alquileres, hacía visitar los departamentos vacíos a los futuros inquilinos, servía de intermediario entre los inquilinos y los dueños cuando esos vivían a lo lejos, contrataba a los artesanos para los arreglos necesarios, abría el portal e indicaba los pisos y/o número de departamentos a los visitantes. Eso durante el día. Pero tenía que trabajar de noche, casi. Porque de noche, el portal quedaba cerrado, así que los visitantes – y los moradores – para entrar o salir tenían que llamar a la puerta y mencionar su apellido, y la portera, desde su cama, tenía que “tirar del cordón” para abrir la puerta.

          Como se puede deducir, la portera parisina tenía mucho control sobre todo lo que entraba, salía o pasaba por su edificio. Sabía más o menos quién escribía a quien, quién visitaba a quien, y cuándo, quién salía y a qué hora, y muchas veces recibía las confidencias de los moradores más charlatanes. De allí que tenían esa fama de chismosas, hasta la palabra “concierge” se vuelvo sinónimo de cotilla y entrometida. Una fama bastante merecida, lamento decirlo.

          Pero en Francia esa honorable profesión desapareció del todo. ¿El portal? Se abre con un código digital. ¿El correo? El cartero tiene las llaves y se las arregla para repartirlo en los correspondientes buzones. ¿La limpieza? Una empresa se hace cargo, una hora o dos al día, a veces menos, y los/las empleados/as tienen que hacerlo todo en el tiempo impartido, sea posible o no. ¡Garantía de cualidad! O no. ¿El alquiler? ¿Las visitas de departamentos vacíos? Ver con la agencia. ¿Las obras necesarias? Ver con el administrador. Si el ascensor tiene una avería, si se tiene que cambiar una bombilla en el rellano, tener paciencia. El administrador es un hombre muy ocupado, tiene problemas mucho más importantes que tratar. ¿Por qué cree usted que lo tiene que pagar tarifa tan alto? Porque es un hombre importante y muy ocupado, el administrador.

          Pues señoras y señores, fíjense ustedes que nuestros amigos porteños no tienen esos problemas. Ellos supieron conservar, para la mayoría de sus edificios, esa persona de carne y hueso, por lo general disponible y sumamente acogedora. Acogedor, tendría que decir, ya que al contrario de Paris, casi todas las porteras de Buenos Aires son porteros.

          Ellos también viven en una portería del piso bajo, más o menos amplía según la generosidad del constructor o de los propietarios. Unos viven acá con su familia, cuando hay bastante espacio, otros prefieren vivir en otro sitio, a veces en otro barrio. Y es que los encargados porteños no tienen que estar presentes las 24 horas. Descansan los fines de semana, por lo menos a partir de las 12 los sábados. En tal caso, el administrador contrata a un sustituto.

Despacho de encargado- Buenos Aires

          Si me refiero a lo que experimenté durante mis varias estancias en Argentina, los encargados son gente amable, disponible, acogedora y agradable. Al contrario de sus colegas parisinos, se pueden encontrar sin problema cuando uno los necesita. Cuando no están trabajando en las escaleras, están en la entrada, donde disponen de un pequeño despacho para recibir a la gente. Es más: muchas veces, están en la vereda delante del portal, charlando con un morador, un transeúnte, un vecino o el dueño de la tienda de enfrente. Unos, con mucho estilo, llevan uniforme: traje oscuro, corbata, gorra, botones dorados… En rigor de verdad, tienen dos tipos de trajes. Por la mañana, cuando trabajan en la limpieza o unos arreglos, traje de trabajo manual, pantalones y chaqueta (saco, en castellano argentino) de tela azul o marrón. Por la tarde, se hallan detrás de su escritorio en la entrada, y visten el traje “de recepción”. Pero cual sea el caso, los van a reconocer en seguida.

Encargados de edificios en recepción

          Amables y acogedores, sin lugar a dudas. Pero ojo que son muy atentos. Ni hablar de dejar entrar a un indeseable en el edificio, los encargados están vigilando. Para entrar, hay que tener motivos honestos, que si no, no les van a dejar pasar. Los moradores pueden dormir tranquilos: ningún vendedor de aspiradores podrá subir hasta su piso. Bueno, podrá intentar llamarle desde el portal. Tampoco Buenos Aires es una ciudad anticuada, y cada edificio cuenta con un interfono. Pero ojo que aunque pueda pasar el portal, ¡es muy probable que vaya a tener que contestar la pregunta del encargado!

          Disponibles lo son. Los moradores siempre pueden solicitarlos cuando lo necesitan. Los encargados de edificios de Buenos Aires son muy versátiles, capaces de resolver todos los pequeños problemas de la vida cotidiana en un edificio. Fregadero obstruido, persiana deteriorada, ascensor bloqueado (eso pasa a menudo en la capital argentina, donde los ascensores son por lo general bastante antiguos), el encargado de edificio porteño está acá para sacarle del lío. Conoce muy bien el barrio: así que no dude en pedirle información, dónde se puede encontrar el mejor restaurante de la zona, un buen médico, un dentista, que colectivo lleva a tal lugar, como conseguir un taxi sin necesidad de ir andando media hora, etc…

Charlando delante del portal

          O sea que nuestros amigos porteños tienen suerte. Dentro de un mundo cada vez más desencarnado, representan la presencia humana imprescindible que está faltando cada vez más en nuestro ambiente robotizado. Cada vez más estamos hablando con maquinas, faltan interlocutores en carne trémula, lo cual genera estrés, irritación, sentimiento de impotencia frente a los pequeños problemas de la vida cotidiana. Pero guardamos la esperanza: en Paris, recién empezamos a ver como vuelven los « concierges« , lo que demuestra claramente su utilidad y el deseo de la gente de tener interlocutores directos en sus edificios.

2. Testimonio de un portero de Buenos Aires

          Durante mi estancia en Buenos Aires, en 2020, tuve la suerte de encontrar en el edificio donde vivía un encargado del edificio encantador. Un hombre tan amable como culto, y recuerdo con mucha nostalgia nuestras charlas en todos los temas, así como nuestros intercambios sobre nuestras culturas respectivas. Hasta me hizo el honor de su casa, él y su esposa no me dejaron pasar la cena de Nochebuena solo, me invitaron a compartir la suya, con sus dos hijos. A pesar de la distancia, todavía quedamos en contacto casi a diario, y aceptó colaborar en ese artículo, contestando mis preguntas y mandándome unas fotos. Le agradezco mucho su amistad, así como la de toda su familia. Un orgullo y un placer conocerlos.

Siguen sus respuestas a mi pequeña entrevista, sobre su oficio.

¿Puedes presentarte un poco, tu nombre, edad, familia?
Mi nombre es Benito Romero, tengo 55 años. En mi familia somos 4 mi esposa mis dos hijos (varón /mujer) y yo.

¿Eres encargado de edficio desde que empezaste a trabajar, o tenías otro oficio antes?
Soy encargado de edificio desde hace 18 años antes de eso trabaje 18 años en un comercio.

¿En qué consiste tu trabajo?
Mi trabajo consiste en la limpieza y el mantenimiento general del edificio en el que trabajo, verificar que funcionen bien los ascensores, las bombas de agua, las luces, recepción y reparto de correspondencia, y todo lo que haga al funcionamiento normal de un edificio.

Benito trabajando por la mañana

¿Cuáles son tus horarios de trabajo?
Trabajo en horario cortado, a la mañana desde las 7 hasta las 12 y a la tarde desde las 17 hasta las 21.

¿Qué es lo que más te gusta en este oficio?
Lo que más me gusta de este trabajo, es que uno interactúa constantemente con todo tipo de personas y conoce y se hace amigo de mucha gente de diferentes clases sociales.

¿Tenés un buen sueldo? Sin decir lo que ganas exactamente, ¿Por lo menos puedes comparar con otro(s) oficio(s) más o menos equiparable(s)?
Yo tengo un buen sueldo puedo llegar a fin de mes holgadamente porque tenemos un plus en el que cuanta más antigüedad tengas mejor sueldo tenés. Este gremio esta en el medio del escalafón salarial comparado con otros gremios.

¿Existe un gremio de porteros?
En Argentina tenemos un gremio de porteros grande y fuerte. Grande a nivel de afiliados y fuerte porque es respetado tanto por los otros gremios como así también por los empleadores. Es el único gremio que tiene una universidad para los hijos de los trabajadores.

¿Conoces a muchos otros porteros? ¿En tu calle/barrio/ciudad?
Somos gente muy comunicativa por eso en el barrio nos conocemos casi todos, nos encontramos por la calle, el supermercado, la panadería , la escuela y así se conforma una linda comunidad de porteros.

En Paris desaparecieron poco a poco los porteros en los años 70-80. Hoy quedan pocos. ¿Cuál es la tendencia en Buenos Aires?
En Buenos Aires es un gremio que también tiende a desaparecer con el tiempo, hay lugares donde cuando se jubila el portero ya no lo reemplazan, ponen empresas de limpieza y así se va tercerizando todo.

¿Puedes contarnos una anécdota que ocurrió cuando estabas trabajando?
Mis anécdotas son siempre con los niños. Me gustan mucho los chiquitos y había una pareja joven que alquilaron un departamento en el edificio; al poco tiempo, la señora quedo embarazada y nació un niño que vi crecer hasta que se mudaron dos años después.
Unos meses después, suena el timbre de casa y al responder ¡escucho una vocesita que pregunta por mi! Ese día recibí uno de los más hermosos abrazos de mi vida. Todavía a pesar de la edad se acordaba de mi !!!!!! El cariño y la ternura de mi amiguito fue algo que me conmovió, aun hoy cuando me acuerdo o lo cuento me emociono.

Benito Romero

Concierges de Buenos Aires

1.LES CONCIERGES D’ICI ET DE LA-BAS

          Voilà bien une profession pourtant très utile qui a pratiquement disparu de nos capitales européennes : celle des concierges d’immeubles. Les plus anciens d’entre nous se souviendront peut-être que jusque dans les années soixante-dix, chaque immeuble parisien était doté, à son rez-de-chaussée, d’une petite loge où vivait, avec sa famille, la concierge. Je dis «la», car dans l’immense majorité des cas, il s’agissait d’une femme. Que faisait-elle dans l’immeuble ? Plein de choses. C’est elle qui recevait, puis distribuait le courrier des résidents, elle qui était chargée de maintenir les espaces communs en bon état de propreté, qui sortait les poubelles collectives, qui percevait les loyers des éventuels locataires, qui faisait visiter les appartements vacants, qui faisait l’intermédiaire avec les propriétaires distants, qui se chargeait de solliciter les entreprises de réparations, elle encore qui indiquait aux visiteurs l’étage des visités, elle enfin qui contrôlait strictement l’accès des dits visiteurs à l’immeuble. Et même l’accès tout court, car il fut une époque où elle devait ouvrir à tous ceux qui sonnaient durant la nuit pour entrer ou sortir. Elle «tirait le cordon» depuis son lit, comme on peut le lire dans certains romans populaires.

          Naturellement, cette position privilégiée de «tour de contrôle» de son immeuble lui permettait de connaitre beaucoup de l’intimité des habitants. Le passage du courrier par sa loge lui permettait de savoir qui écrivait à qui, elle savait qui sortait quand, qui recevait qui et quand, et il n’était même pas rare qu’on lui fasse spontanément des confidences. D’où une réputation de curiosité, voir d’intromission, qui n’était pas forcément usurpée.

           Mais chez nous, cette honorable et précieuse profession a totalement disparu. Le portail d’entrée ? Actionné par un «digicode». Le courrier ? Le facteur a le code et les clés des boites aux lettres, qu’il se débrouille. Le ménage ? Une entreprise vient une heure ou deux par jour, quelquefois moins, et ses employés sous pression doivent se dépêcher de tout faire dans le temps qui leur est imparti. Qualité garantie ! Les loyers ? Les visites d’appartements vacants ? Voyez avec l’agence. Les petits – ou grands – travaux collectifs ? Adressez-vous au syndic. S’il y a une panne d’ascenseur, ou une ampoule à changer, prenez votre mal en patience. Le syndic, il n’a pas que ça à s’occuper, de vos petits problèmes. C’est même pour ça que vous payez si cher vos charges locatives : c’est un personnage super important, et toujours très occupé, le syndic.

          Et bien mesdames-messieurs figurez-vous que nos heureux amis portègnes (habitants de Buenos Aires) ont le bonheur d’échapper à tout ça, et d’avoir conservé, dans la plupart de leurs immeubles, une personne en chair et en os, et en règle générale disponible et charmante. Charmant, devrait-on dire plutôt, car contrairement à Paris, à Buenos Aires ce sont principalement des hommes qui occupent la fonction.
          Eux aussi habitent une loge, plus ou moins grande selon la générosité des constructeurs et/ou des propriétaires. Certains y résident à demeure, avec leur famille – quand c’est assez grand, donc – d’autres logent ailleurs. Car à la différence de nos anciennes concierges, leurs collègues Argentins ne doivent pas être présents 24h sur 24. Dans la plupart des cas, ils disposent également de leur week-end, au moins à partir du samedi midi. Dans ce cas, ils sont remplacés, pour assurer une permanence.

Bureau d’accueil d’un immeuble de Buenos Aires

          Pour ce que j’en ai vu pendant mes différents séjours, ce sont généralement des gens affables, disponibles, accueillants et conviviaux. Contrairement à leurs anciens collègues parisiens, on les trouve facilement quand on a besoin d’eux. S’ils ne sont pas en train de travailler dans les étages, vous les voyez dans le hall d’entrée, où ils disposent d’un petit bureau d’accueil. Souvent même, ils se tiennent sur le pas de la porte, et taillent une bavette avec un locataire, un passant, un voisin, ou le commerçant d’en face. Certains, très stylés, revêtent un uniforme impeccable, costume sombre, cravate, casquette, boutons dorés… En réalité, vous les verrez toujours habillés de deux façons différentes selon le moment de la journée. Le matin, ce sont les travaux d’entretien, alors, tenue «ouvrière», pantalon et veste de toile brune, ou bleue. L’après-midi, en général, ils sont de permanence dans le hall, et là oui, costume «de réception». Dans les deux cas, vous les reconnaitrez au premier coup d’œil.

Concierge à son bureau

          Affables et accueillants, sans l’ombre d’un doute, mais attention, ils sont vigilants. Pas question de laisser entrer un intrus indésirable dans l’immeuble, ils veillent au grain. Pour entrer, il faut montrer patte blanche, sinon, vous pouvez toujours courir. Avec eux, les locataires peuvent être tranquilles : il y a peu de chances qu’un démarcheur parvienne jusqu’à leur porte personnelle. Mais bon, celui-ci peut toujours tenter sa chance en sonnant depuis l’extérieur : chaque immeuble est pourvu d’un interphone, Buenos Aires est une ville moderne. Mais même si le locataire vous a ouvert, attendez-vous à être interrogé au passage !
          Disponibles, certainement. Les habitants peuvent toujours les solliciter en cas de besoin : les concierges portègnes sont très polyvalents, et capables de faire face à tous les petits tracas du quotidien résidentiel. Évier bouché, volet coincé, ascenseur bloqué (ennui fréquent dans la capitale argentine, où le parc d’ascenseurs a un certain âge : beaucoup d’immeubles disposent encore d’ascenseur à grille !), le concierge portègne est là pour vous sortir de la panade. Il connait le quartier comme sa poche : n’hésitez donc pas à lui demander des renseignements : où se trouve le meilleur restau du coin, un bon médecin, un dentiste, quel bus prendre pour aller n’importe où, obtenir un taxi sans être obligé de marcher pendant une demi-heure, etc…

          Bref, nos amis portègnes ont bien de la chance. Dans notre monde chaque jour plus désincarné, ils sont l’indispensable présence humaine qui commence à sérieusement manquer dans notre environnement sans cesse plus robotisé. Nous parlons toujours davantage à des machines, et trop souvent, nous manquons d’interlocuteur en chair et en os, ce qui génère stress, énervement, sentiment d’impuissance face aux petits problèmes de la vie quotidienne. Mais il y a de l’espoir : à Paris, depuis peu, on recommence à voir quelques concierges dans les immeubles, preuve de leur utilité, et du désir grandissant des habitants de se doter d’interlocuteurs directs à l’intérieur de leur immeuble.

2. UN CONCIERGE PORTEGNE TEMOIGNE

          Pendant notre séjour à Buenos Aires, en 2020, j’ai eu la chance de rencontrer, dans l’immeuble où j’habitais, un concierge vraiment charmant. Un homme aussi gentil que cultivé, et ce n’est pas sans nostalgie que je me souviens de nos conversations sur toutes sortes de sujets, et nos échanges sur nos cultures respectives. Il m’a même fait les honneurs de sa maison, et ne m’a pas laissé passer seul le réveillon de Noël, puisque son épouse et lui m’ont invité à partager leur repas ce soir-là, avec leurs deux grands enfants. Malgré la distance, nous sommes restés en contact et nous échangeons presque quotidiennement. Il a accepté de participer à cet article en répondant à mes questions et en m’envoyant les quelques photos qui l’illustrent. Je tiens à le remercier chaleureusement de son amitié fidèle, et celle de toute sa famille. Les connaitre est pour moi une fierté et une grande joie.

          Voici ci-dessous les réponses qu’il a bien voulu faire à mes questions.

Tu peux te présenter un peu, ainsi que ta famille ?
Je m’appelle Benito Romero, j’ai 55 ans. Dans ma famille, nous sommes quatre, avec ma femme et mes deux enfants (un garçon et une fille).

Tu es concierge depuis toujours, ou tu as travaillé ailleurs avant ?
Je suis concierge depuis 18 ans. Avant, j’ai travaillé pendant 18 autres années dans un commerce.

En quoi consiste ton travail ?
Je m’occupe du nettoyage et de l’entretien général de l’immeuble, je vérifie le bon fonctionnement des ascenseurs, de la distribution d’eau, de l’électricité, je fais l’accueil, la distribution du courrier, tout ce qui concerne le fonctionnement normal d’un immeuble.

Benito au travail

Quels sont tes horaires de travail ?
Je travaille en horaire discontinu, le matin de 7 heures à 12 h et l’après-midi de 17 h à 21 h.

Qu’est-ce qui te plait dans ce travail ?
Ce que j’aime, c’est surtout le contact permanent avec toutes sortes de gens, on rencontre et on sympathise avec des gens de toutes conditions sociales.

Tu es bien payé ? Sans dire combien tu gagnes exactement, peux-tu au moins faire une comparaison avec d’autres métiers ?
J’ai un bon salaire, qui me permet de joindre aisément les deux bouts, d’autant qu’il s’améliore avec l’ancienneté. C’est un métier qui fait partie du milieu de l’échelle, en termes de salaire, comparé aux autres.

Il existe un syndicat de concierges ?
En Argentine nous avons un syndicat de concierge important et fort. Important en nombre d’adhérents et fort parce qu’il est respecté, autant par les autres syndicats que par les employeurs. Et c’est le seul syndicat qui propose une université pour les enfants des employés.

Tu connais beaucoup d’autres concierges, dans ta rue, ton quartier ou ta ville ?
Nous sommes des gens très communicatifs et sociables, dans le quartier nous nous connaissons tous, on se voit dans la rue, au supermarché, chez le boulanger, devant l’école, nous formons ainsi une très belle communauté.

Aimable discussion devant l’entrée

A Paris, les concierges ont peu à peu disparu dans les années 70-80. Il n’en reste pratiquement plus aucun. Quelle est la tendance à Buenos Aires ?
A Buenos Aires c’est une corporation qui tend également à disparaitre avec le temps, il y a de plus en plus d’endroits où le concierge qui part en retraite n’est plus remplacé, ils font appel à des entreprises de nettoyage, le métier tend à s’externaliser.

Tu peux nous raconter une anecdote concernant ton métier ?
Les anecdotes que je pourrais raconter ont trait aux enfants. J’adore les enfants, et je me souviens d’un couple de jeunes qui avait loué dans l’immeuble. Quelque temps après, la femme était tombée enceinte, et avait donné naissance à un petit que j’ai vu grandir jusqu’à ce qu’ils déménagent, deux ans après.
Quelques mois plus tard, la sonnette de notre appartement retentit, je réponds à l’interphone, et voilà que je reconnais une petite voix familière ! Ce jour-là, j’ai reçu un des plus beaux câlins de ma vie. En dépit du temps passé il se souvenait de moi ! L’affection et la tendresse de mon très jeune ami m’ont beaucoup ému, et aujourd’hui encore, en le racontant, je ressens beaucoup d’émotion.

Benito à son bureau

¿Buenos o malos aires?

Escrito el 22 de enero de 2020

          Es LA pregunta, cuando me interrogan sobre mi pasión por la capital argentina. Y ya que no me gusta, cuando se me hace una pregunta, no saber qué contestar, tengo la respuesta preparada. ¿Lo que me gusta de Buenos Aires? Su alma, su ambiente, su atmósfera.

          Ya. O sea, la típica respuesta cursi, la fórmula rimbombante por excelencia. El alma, la atmósfera, esas palabras tan vacías que uno puede llenarlas con todo lo que le viene a la gana. Hay lugar. Pero sin embargo… Sí que hay algo en el aire, en la atmósfera, algo difícil de describir, pero que hace de Buenos Aires una ciudad que no se parece a ninguna otra, bueno, dentro de las que ya visité, en Francia o en otros países. Ya, ¿y entonces? ¿Qué? ¿Qué es lo que se puede entender detrás de esas palabras?

          Me lo pregunto. Ya que en realidad, por qué amo esta ciudad, si me paro un rato a reflexionar, en absoluto no lo sé. Si me paro un rato a reflexionar, si me paro cinco minutos para medir sus encantos, lo que veo primero son sus defectos. Dicho de manera desordenada: es una ciudad demasiado grande, ruidosa, mal cuidada, anárquica, imposible de entender para el viajero ocasional, hasta puede presentar un ambiente hostil a veces, en ciertos barrios a ciertas horas. Al contrario de otras capitales más valoradas, como Paris o Londres, muestra una cara totalmente disonante en cuanto a la arquitectura. Permitieron los peores atentados al buen gusto, el vandalismo más salvaje contra la historia, justificaron, hasta alentaron destrucciones irreparables contra edificios que nunca más podrán testificar del pasado sin embargo tan apasionante de esta ciudad.

          Tomemos de ejemplo el barrio que mejor conozco puesto que resido aquí cuando voy a Argentina: La Recoleta. Leer las guías, ver los documentales, siempre sale el mismo refrán: Recoleta es “el barrio más parisino de Buenos Aires”. Bueno, no es que sea totalmente falso. Recoleta es más parisino que San Nicolás, La Boca, Palermo, Balvanera… eso sí. Y mucho. Pero hay que relativizar un poco. Depende de lo que uno entiende por “parisino”, claro.

          El nombre del barrio viene del francés: aquí los “Recollets”, monjes franciscanos que venían de Francia, construyeron un convento a principios del siglo XVIII. Luego, hubo una ola de migración francesa entre 1840 y 1850, una década de fuerte inmigración gala. La única, puesto que la siguiente, entre 1890 y 1910 trajo sobre todo italianos, alemanes y europeos del este, sin hablar de los españoles, claro, siempre mayoritarios (Una curiosidad en cuanto a la inmigración española. Como dentro de ellos figuraba un montón de gente procedente de Galicia, permaneció el apodo: en Argentina, un inmigrante español siempre lo califican de “gallego”).

          No se puede cuestionar que Francia dejo ciertas huellas arquitecturales en el barrio, que todavía se pueden notar allí o allá, como por ejemplo el Palacio Duhau o unos edificios “haussmanianos”, (del barón Haussmann, quien tanto influyo en el aspecto actual de Paris durante el reino de Napoleón III), o “art déco”, ya que esta influencia francesa se mantuvo hasta 1930, más o menos.

          Pero la verdad es que Argentina es un país americano, con todas sus cualidades y todos sus defectos. Quiero decir que aquí la única regla en arquitectura, es… que no hay ninguna regla. No existe un organismo como “Bâtiments de France” en Argentina, para proteger el patrimonio arquitectural nacional.

         Los años 60 (años en que, además, gobernaron sobre todo militares poco aficionados a la piedra antigua), ansiosas de encontrar espacio para la vivienda, fueron devastadoras. No se alzó nadie para defender los edificios históricos. No sólo destruyeron mucho, pero también construyeron sin reglas, tanto en lo que se refiere al estilo como en lo que se refiere a la altura o los materiales utilizados. Así poco a poco la ciudad se vuelve un mero “patchwork” de construcciones heterogéneas. Por ejemplo, avenida Callao:

Y así se podrían multiplicar los “encontronazos”.

          Así que no puedo, verdaderamente, pretender que Buenos Aires sea “una ciudad linda”. Ni hablar de las veredas (cuidado con los baches y las placas que sobresalen), tampoco de los enormes contenedores de basura en plena calle, o de las avenidas repletas de coches bocinando (Buenos Aires cuenta con tan sólo una calle peatonal, la Florida). No, no es por su belleza que amo a esta ciudad. Paris, Londres, Madrid, Viena, son ciudades muchos más lindas en cuanto a su arquitectura. Ciudades cuyo patrimonio supieron preservar, y donde no se permitió a los promotores realizar masacres armados de martillos neumáticos y hormigoneras. Aunque ojo, incluso en Paris, si uno se pasea en la zona de la “Porte d’Italie”, por ejemplo, se puede constatar también como se perpetraron atentados irreparables…

          Cuidado que no estoy pretendiendo que Buenos Aires ya no tiene patrimonio. Queda mucho, por suerte. Además desde una década hay una toma de consciencia, y el tiempo alegre de la fiesta destructiva parece haber terminado. Sin embargo ya es demasiado tarde para algunos tesoros desaparecidos. Se cometieron daños irreversibles. No queda nada por ejemplo de los conventillos de San Telmo, que albergaron los migrantes del fin de siglo XIX. Nada del primer puerto de la ciudad, en La Boca, convertido en teatro para turistas, con sus casas pintadas y sus falsos bares de tango (Para el tango, ir hasta Boedo, menos ostentoso pero mucho más autentico).

          Bueno, entonces, ¿Acaso nos va a escupir porque te gusta tanto esta ciudad desvencijada? Exactamente eso: sus cicatrices, sus dolores, su nostalgia para una historia cuyos testigos ya fallecieron casi todos, su alma de ciudad herida, martirizada, arruinada, pero sin embargo tan viva, tan alegre, tan optimista a pesar de las brutalidades del tiempo, de la economía y de la corrupción de sus elites políticas. O sea que lo que me gusta ante todo en esta ciudad son sus habitantes, los porteños. Los que animan a su alma, que modelan su ambiente, y calientan su atmósfera.

 

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Para ilustrar este artículo, añadí una pequeña galería de fotos abajo. Intenté elegir unas imágenes representativas de la arquitectura porteña.

(Todas las fotos son del autor del presente artículo)

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Pequeño panorama de la arquitectura porteña:

LA RECOLETA, esquina Juncal y Talcahuano:

LA PLAZA DE MAYO. A la izquierda, el Cabildo, en frente la catedral.

Avenida Santa Fe:

SAN TELMO

Otra vez en SAN TELMO, calle San Lorenzo:

Avenida Corrientes:

Entrada al « Caminito », barrio de La Boca

En 1940 :

70 años más tarde:

LA BOCA para los turistas:

LA BOCA de los porteños:

PALERMO:

PUERTO MADERO:

La tienda inglesa Harrods, esquina de San Martín y Córdoba. Abandonada desde 1998:

PARQUE CHAS, barrio residencial en el norte de Buenos Aires:

 

 

Y para terminar, al voleo:

 

 

 

 

 

 

 

PV

Pourquoi aimer Buenos Aires ?

Rédigé le 22 janvier 2020

          C’est une question qui revient souvent, lorsqu’on m’interroge sur ma passion pour cette ville. Comme j’ai horreur, en général, de ne pas savoir répondre à une question, j’en ai donc une toute prête pour celle-ci. Ce que j’aime de Buenos Aires ? Son âme, son ambiance, son atmosphère.

         Voilà bien une réponse qui sent la formulation toute faite, prête à l’emploi. «L’âme», «l’atmosphère», ces mots tellement creux qu’on peut y faire rentrer tout ce qu’on veut, il y a de la place. Mais pourtant… Il ya quelque chose dans l’air, dans l’atmosphère, justement, difficile à décrire, mais qui fait que cette ville ne ressemble à aucune autre, enfin, parmi celles que j’ai eu la chance de visiter, en France et ailleurs. Alors quoi, hein ? Qu’est-ce qu’on peut mettre de réel derrière ces mots ?
Je me le demande sérieusement. Parce qu’en réalité, pourquoi j’aime tant cette ville, si je réfléchis un peu, je n’en sais fichtre rien.

          Parce que si je me pose cinq minutes pour l’observer dans tous ses atours, pour la regarder vivre dans tout son quotidien, ce que je constate d’abord, c’est qu’elle ne manque pas de défauts. Pêle-mêle : c’est une ville trop grande, sale, bruyante, assez mal entretenue, désordonnée, incompréhensible au voyageur de passage, voire hostile parfois, à certains moments ou dans certains quartiers. Contrairement à d’autres capitales plus huppées, comme Paris ou Londres, elle est totalement disharmonique, architecturalement parlant. On y a autorisé les pires attentats au bon goût, permis le plus sauvage vandalisme contre l’Histoire, justifié, voire même encouragé des destructions irréparables contre des bâtiments qui ne pourront plus jamais témoigner du passé pourtant passionnant de cette ville.

          Prenons par exemple le quartier que je connais maintenant le mieux : La Recoleta. Consultez les guides, lisez les brochures, regardez les documentaires, vous entendrez toujours le même refrain : Recoleta, c’est le «quartier le plus parisien de Buenos Aires». Ce n’est pas tout à fait faux : le plus parisien, certainement. Plus parisien que San Nicolas, que la Boca, que Palermo, que Balvanera… Naturellement. Tout dépend de ce qu’on entend par «parisien».

          Le nom même du quartier est d’origine française : c’est à cet endroit que les «Recollets», moines franciscains venus de France, ont installé un couvent au début du XVIIIème siècle. Puis, seconde vague française vers 1840, décennie de forte immigration gauloise. La seule, d’ailleurs, car ensuite, durant l’autre grande vague migratoire européenne vers l’Argentine, entre 1890 et 1910, ce sont surtout les Italiens, les Allemands et les Européens de l’est qui sont arrivés. (Je ne parle pas des Espagnols, migrants permanents vers ce pays. C’est rigolo d’ailleurs : au XIXème siècle, c’était surtout des galiciens qui venaient, du coup le nom est resté. Pour un Argentin, un Espagnol d’origine, c’est toujours un «gallego»).

          Il n’en est pas moins vrai qu’au cours du XIXème, la France a laissé une assez forte empreinte architecturale sur le quartier, dont il reste quelques traces marquantes, comme le Palais Duhau ou quelques immeubles effectivement «haussmanniens», voire art déco, car cette influence s’est maintenue jusqu’en 1930 à peu près.

          Seulement voilà : l’Argentine est un pays américain dans toute sa splendeur. Je veux dire par là que la seule règle qui vaille, c’est qu’il n’y en a pas. De règle. Pas de «Bâtiments d’Argentine» comme il y a les «Bâtiments de France», pour protéger le patrimoine historique.

          Les années soixante (durant lesquelles, de surcroit, dominèrent des gouvernements militaires ultra-libéraux pas vraiment amateurs de vieilles pierres), avides d’espace pour le logement, ont été dévastatrices. Et personne pour défendre les édifices historiques. Non seulement on a beaucoup démoli, mais on a construit sans règle, donc. Ni pour le style, ni pour les hauteurs, ni pour les matériaux. C’est ainsi que peu à peu, la ville s’est retrouvée totalement «mitée», ne formant plus qu’un vilain patchwork de constructions hétéroclites.

          Tenez, par exemple, sur l’avenue Callao :

Photo PV

          On pourrait multiplier les exemples d’ «encontronazos», comme on dit ici, de chocs de culture.

          Alors non, je ne peux pas prétendre que Buenos Aires soit une belle capitale. Ne parlons pas des trottoirs (gaffe aux trous et aux plaques descellées), des conteneurs à poubelles énormes, le long des rues, et qui débordent, et des avenues livrées aux voitures (une seule pauvre rue piétonne dans le micro-centre : la rue Florida). Ce n’est pas pour sa beauté que j’aime tant cette ville. Paris, Londres, Madrid, Rome, Vienne, sont des villes bien plus belles architecturalement parlant. Des villes où on a su préserver le patrimoine, et où on n’a pas permis partout que des promoteurs massacrent l’histoire à coup de marteaux-piqueurs et de bétonnières. (Je dis bien «pas partout», parce que si on va faire un tour du côté du quartier de la Porte d’Italie à Paris, hein…)

          Attention cependant : je ne suis pas non plus en train de dire que Buenos Aires n’a plus de patrimoine. Il en reste quand même pas mal, heureusement. Et depuis une dizaine d’années, une prise de conscience a eu lieu, et le joyeux temps du n’importe semble terminé.

          Mais hélas, des dégâts irréversibles ont été commis. Il ne reste plus rien, par exemple, des conventillos de San Telmo, qui abritaient les émigrants du début du XXème. Plus rien non plus du premier quartier portuaire, transformé en guignol à touristes avec ses maisons peintes et ses fausses boites à tango. (Pour le tango, allez voir à Boedo, c’est moins pimpant, mais bien plus authentique).

          Alors quoi, qu’est-ce que tu aimes tant, de cette ville déglinguée ? Ben justement ça : ses cicatrices, ses douleurs, sa nostalgie pour une histoire dont on a tué tous les témoins, son âme de ville blessée, martyrisée, enlaidie, mais pourtant tellement vivante, tellement gaie, tellement optimiste en dépit des brutalités du temps, de l’économie et de la corruption de son personnel politique. En somme, ce que j’aime de Buenos Aires, surtout, ce sont les Portègnes, comme s’appellent ici les habitants. Et qui font… son âme, son ambiance et son atmosphère.

          Pour illustrer mon propos, vous trouverez ci-dessous en annexe une petite galerie photos, où j’ai essayé de vous présenter les diverses facettes de l’architecture portègne !

          (Toutes les photos sont du rédacteur de cet article)

 

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GALERIE PHOTOS : petit tour d’horizon architectural.

La Recoleta, au coin des rues Juncal et Talcahuano :

Plaza de Mayo. A gauche, le Cabildo, en face, la cathédrale :

Avenue Santa Fe :

San Telmo :

Toujours dans San Telmo, rue San Lorenzo :

Avenue Corrientes :

L’entrée du Caminito, quartier de La Boca :

En 1940

70 ans plus tard

La Boca pour les touristes :

 

La Boca au naturel :

 

Palermo :

Puerto Madero :

Le magasin anglais Harrods, au coin de la rue San Martín et de l’avenue Córdoba. Friche commerciale depuis 1998 :

Parque Chas, quartier résidentiel au nord de Buenos Aires :

 

 

Et un petit « pêle-mêle » au hasard des rues, pour finir :

Hablar el argentino

          Uno puede hablar un español perfecto, incluso sin el mínimo acento de su país de origen, al llegar por primera vez en Buenos Aires, nadie se va a equivocar. Todo el mundo se percatará de que no viene de “acá”, como dicen en vez de “aquí”. A lo mejor, van a pensar que viene de España, y ya es todo un elogio. Pero lógico: los europeos aprendemos el español de España. Los suramericanos en general, y los argentinos en particular, hablan el “castellano”. También lógico: era el idioma de los primeros colonos. Claro que los españoles también hablan el castellano, pero ya no es más que una forma de distinguir ese idioma de los demás idiomas regionales, como el catalán, el gallego o el asturiano. El castellano se volvió el idioma de todos los españoles. O sea, el español. Pero los suramericanos no son españoles. Así que ellos siguen hablando el castellano. Está claro además que castellano y español evolucionaron de manera bastante distinta. Hasta formar dos idiomas muy parecidos eso sí, pero al mismo tiempo muy distintos. No sé si me explico bien.

          En América influyeron en el idioma muchas aportaciones ajenas. Empezando, como es de suponer, por los pueblos originarios: incas, mayas, aztecas, pero también guaraníes, quechuas, aymaras, mapuches, pampas, etc… Y luego, todos los inmigrantes, sobre todo europeos. No sólo aportaron su propia cultura, sino también su manera de hablar, y su propio vocabulario.

          Argentina acogió al mundo entero, o poco menos. Europeos, africanos, asiáticos, por una parte, y otros americanos, luego, por otra parte. Los primeros llegaron sobre todo hasta el principio del siglo XX, los demás, sobre todo paraguayos, bolivianos, uruguayos, en la actualidad. El gran campeón de las migraciones “argentinas” es sin duda el italiano. Son los italianos, al fin y al cabo, quienes dejaron la huella más profunda en la cultura argentina. Hasta tal punto que muchas veces oí decir que “los argentinos son italianos hablando español”. O, hablando sólo de idiomas, que el castellano es un italiano disfrazado de español. No es por casualidad que el “Lunfardo”, esa jerga porteña, viene directamente del italiano napolitano.

Unos ejemplos de palabras en lunfardo – Foto DP

          Y parece una evidencia: los argentinos hablan en español, pero como lo haría un italiano. Mismo tono de voz, mismo lenguaje corporal, mismo volumen. Misma manera de insistir en las sílabas acentuadas, misma negativa a pronunciar correctamente las “z” y las “c” delante de los vocales. El argentino no habla con la lengua entre los dientes. Coser y cocer se pronuncian igual, lo que fastidia a los españoles. Otra diferencia, pero esta vez los españoles no se enfadan, sino que se ríen, es esta manera de pronunciar las “y” y las “ll”. Algo como la “x” en asturiano, casi una “ch”, como en “Xurde”, o en “Xavi”. Algo de que, desgraciadamente, este texto no puede dar cuenta.

          Sin hablar del vocabulario. Las particularidades americanas no contribuyen poco a la riqueza del diccionario español. Y es que hay muchas. Por ejemplo, una chaqueta española es un saco en Argentina. Una falda en Madrid es una pollera en Buenos Aires. No intente encontrar melocotones en un mercado argentino: sólo encontrará duraznos. Inútil pedir un billete de tren cuando sólo venden boletos. No quejarse del mal estado de las aceras porteñas: no hay más que veredas, de todas maneras. No protestar cuando el camarero le propone facturas para desayunar: se trata sólo de bollería. Bollería constituida de medialunas en vez de “croissants” sin duda demasiados franceses. Y al marcharse de la cafetería, no llamar al mozo con el tradicional “¿me cobras por favor?”, pedir la cuenta, sencillamente.

          Y sólo son unos ejemplos, claro. No pretendo tener una ciencia académica en este terreno, faltaría mucho. Mi nivel de castellano argentino todavía queda muy bajo. En Buenos Aires todo el mundo se daba cuenta de que no era más que un mero europeo hablando español. Bastante bien, eso sí, pero hablando el español de España, con un acento indefinible, aunque sin lugar a dudas no español.

          Lo más divertido ahora, al volver a Europa, es que mis amigos asturianos se burlan de mis confusiones. Fingiendo irritarse. Es que después de cuatro viajes a Argentina, y muchos, muchos más, a Asturias, ya no hablo español ni castellano, sino una pobre mezcla de los dos. Aunque no sé decidir si “pobre” o “rica”. Pero sí sé que me falta mucho todavía para saber manejar bien los dos idiomas en todas circunstancias. Sin mezclarlos.

Para ir más lejos :

Cómo hablan los argentinos : corto video de 3’41 sobre particularidades emblemáticas
https://www.youtube.com/watch?v=9U_HCP-FVSU

Lunfardo : cómo hablar el slang de los argentinos. Video de 8’25 animado por dos argentinas muy simpáticas. Se presenta como un pequeño diccionario de lunfardo.
https://www.youtube.com/watch?v=4p8SuPSMEx4

¿Puedes adivinar los acentos hispanos? Un poco de diversión (6’17)
https://www.youtube.com/watch?v=-hJgDufbBO0

¡Y estos videos sólo representan una parte de los que podrán encontrar en la red!

Sobre una pared en Salta – 2016 – Foto PV

Parler argentin

          Vous aurez beau parler couramment l’espagnol, et même en étant capable de faire oublier la plus petite trace de votre accent d’origine, si vous arrivez pour la première fois à Buenos Aires, vous ne tromperez personne. Tout le monde saura instantanément que vous n’êtes pas d’ici. Dans le meilleur des cas, on vous prendra pour un Espagnol. Et ce sera déjà un bien beau compliment.

          C’est logique : nous autres les Européens, nous apprenons l’espagnol d’Espagne. Les Sud-Américains, en général, et les Argentins, en particulier, eux, parlent le «castillan». Bien normal : c’était le langage des premiers colons. Les Espagnols aussi, à une époque, ont parlé le castillan. Mais ils ne veulent plus trop en entendre parler. Et de toute façon, tout comme l’espagnol d’Espagne est très différent de celui d’Amérique du Sud, il en va de même avec le castillan. Le castillan s’est transformé en espagnol en Espagne, mais il est resté le castillan en Amérique du sud. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre. Ce que je veux dire, c’est que le langage d’origine a évolué de façon très différente, selon la géographie. En Espagne, le castillan n’étant utilisé que par des Espagnols, il est donc devenu espagnol. C’est bien logique. En Amérique du sud, il s’est enrichi de multiples influences. Les peuples premiers d’abord, Incas, Mayas, Aztèques, mais également Guaranis, Aymaras, Quechuas, Mapuches, Pampas, etc… Puis les différents groupes humains débarqués de tous les continents, mais surtout d’Europe. Les apports culturels se sont naturellement accompagné des apports de vocabulaire correspondant. Après, tout est une question de proportion : qui a apporté le plus ?

          Comme les autres pays américains, l’Argentine a accueilli pratiquement le monde entier : des Européens, des Africains, des Asiatiques et, bien entendu, d’autres Américains. Majoritairement, fin XIXème et début XXème, les premiers, et maintenant, les derniers, Paraguayens, Boliviens, Uruguayens pour la plupart. Mais le champion incontesté de l’émigration argentine, Espagnol mis à part, c’est l’Italien. Et c’est bien lui qui, au moins à Buenos Aires, a tracé le sillon le plus profond dans le champ culturel argentin. On pourrait presque dire que l’Argentin, c’est un Italien qui parle l’espagnol. Ou que l’espagnol (le castillan) argentin, est un italien déguisé en espagnol. Ce n’est pas par hasard si le «Lunfardo», l’argot typiquement portègne (on appelle portègne tout ce qui se rapporte à Buenos Aires, dont les habitants, par exemple) prend sa source dans le dialecte napolitain.

Quelques exemples de lunfardo – Photo DP

          Car si l’Argentin parle bien l’espagnol, c’est à la manière d’un Italien. Mêmes intonations, même gestuelle, même volume sonore. Même manière de laisser trainer les syllabes accentuées, même refus de prononcer correctement les «z» et les «c» devant les voyelles : un argentin ne parle pas en mettant sa langue entre les dents. Coser (coudre), et cocer (cuisiner), se prononcent de la même façon, ce qui fait hurler les Espagnols. Une autre différence, mais qui cette fois les fait plutôt rire, c’est cette façon spéciale de prononcer les «y» et les «ll» (ye, ou ill, en français). Quelque chose entre le «j» de jouet et le «ch» de chameau : caballo (cheval) devient presque «cabacho», tout comme mayoría (majorité) devient donc «machoría».

          Sans parler du vocabulaire. Qu’on ne s’étonne pas en constatant la différence d’épaisseur entre un bon vieux Robert français et le fameux «Maria Moliner» de nos voisins : il a bien fallu prendre en compte toutes les particularités américaines ! Et elles sont plus de quelques unes ! Ainsi par exemple, une veste, chaqueta en espagnol, c’est un «saco» en Argentine. Une jupe, falda en Espagne, c’est une «pollera» à Buenos Aires. N’essayez pas de trouver des «melocotones» (pêches) sur un marché : vous ne verrez que des «duraznos». Pas la peine de demander «un billete» pour prendre son train, on ne vous vendra qu’un «boleto». Ne vous plaignez pas du mauvais état de la «acera» (trottoir) : de toute façon, il n’y a que des «veredas». Ne faites pas les gros yeux si le garçon du bistrot où vous prenez votre petit-déjeuner vous propose des factures (facturas): ici, ce ne sont rien d’autre que des biscuits, ou des viennoiseries. Et à propos de factures, ne lui demandez pas, au moment de partir, «¿Me cobras por favor ?», comme le ferait tout bon Espagnol à Madrid ou à Séville: c’est un verbe qui lui sonne bizarre. Demandez «la cuenta», ça suffira.

          Et ainsi de suite, je ne vais pas vous développer tout le glossaire, d’ailleurs, je suis bien loin d’en maitriser toutes les subtilités. Moi, à Buenos Aires, tout le monde m’a reconnu : un Français qui parle l’espagnol. Pas trop mal, mais l’espagnol d’Espagne. C’est tout.

          A ceci près que, quatre séjours à Buenos Aires plus tard, mes amis Asturiens, maintenant, à chaque fois que je les vois, s’amusent grandement de mes fréquentes confusions de vocabulaire. En faisant semblant de s’en offusquer. Faudrait voir à pas confondre l’espagnol et l’argentin, tout de même, quoi, à la fin.

Pour aller plus loin :

Cómo hablan los argentinos : courte vidéo de 3’41 sur quelques particularités emblématiques
https://www.youtube.com/watch?v=9U_HCP-FVSU

Lunfardo : cómo hablar el slang de los argentinos. Vidéo de 8’25 présentée par deux dynamiques argentines, comme un petit dictionnaire de lunfardo.
https://www.youtube.com/watch?v=4p8SuPSMEx4

¿Puedes adivinar los acentos hispanos? Sous forme de jeu : saurez-vous reconnaitre les différents accents sud-américains? (6’17)
https://www.youtube.com/watch?v=-hJgDufbBO0

Et ce ne sont que quelques exemples parmi des centaines de vidéos que vous pourrez trouver sur ce sujet sur le net !

Sur un mur de Salta – 2016 – Photo PV